
Les 56 niñas du Guatemala
Elles brûlaient pendant que nous marchions
Le 8 mars 2017, alors que les femmes du monde entier se mobilisaient pour revendiquer le respect de leurs droits, au Guatemala 56 jeunes filles brûlaient vives dans le foyer pour mineur-es Hogar « seguro » Virgen de la Asunción géré par l’État. La veille, elles avaient voulu s’en échapper à cause des violences psychologiques, physiques et sexuelles qu’elles subissaient. Ramenées par la police, elles avaient été enfermées dans une pièce du foyer, dans laquelle s’est déclenché l’incendie. Les forces de l’ordre qui contrôlaient le bâtiment ne sont pas intervenues et ont empêché quiconque de leur porter secours.
Le foyer, inauguré en 2010, devait être un refuge pour les mineur-es vulnérables tels que des enfants des rues et des mineur-es victimes de violences physiques ou d’exploitation. Pourtant, depuis 2014, les enfants accueilli-es dans ce foyer dénonçaient les conditions inhumaines dans lesquelles ils-elles vivaient (insuffisance des infrastructures, mauvaise alimentation, manque de soins médicaux, emprisonnement, torture, viols, grossesses forcées, prostitution et traite). Des institutions nationales – comme le Bureau du Procureur des droits humains (PDH) – et internationales – comme l’UNICEF – avaient également déjà conseillé la fermeture de ce foyer du fait du manque de moyens pour accueillir et protéger les enfants et les adolescent-es.
Jusqu’à présent, on dénombre une jeune fille morte le 7 mars en sautant d’une fenêtre du foyer, 41 jeunes filles brûlées vives pendant l’incendie et 15 gravement blessées, une survivante de l’incendie tuée par arme à feu en avril et plus de 60 jeunes filles disparues à la suite de l’incendie et qui n’ont toujours pas été retrouvées. Aucun suivi formel des 160 mineur-es relogé-es dans d’autres foyers n’a encore été mis en place.
L’ancien directeur du Secrétariat du Bien-être social, Carlos Rodas Mejía, la vice-secrétaire Anahy Keller et l’ancien directeur du foyer, Santos Torres Ramírez, ont été arrêtés le 13 mars 2017, inculpés pour homicide involontaire, lésions corporelles graves, mauvais traitement contre des mineurs, abus d’autorité et manquement à leurs obligations et finalement placés en détention provisoire. Une audience de présentation des preuves a eu lieu du 15 au 19 mai et leur procès devrait se poursuivre en juin ou juillet.
A trois mois de la tragédie, nous continuons de dénoncer la responsabilité de l’État guatémaltèque qui, loin de garantir les droits des personnes placées sous sa protection, s’est fait complice de ce féminicide en ignorant les plaintes réitérées des jeunes du foyer et les recommandations des institutions nationales et internationales. Nous dénonçons également la criminalisation des familles des victimes et la persécution et le harcèlement policiers subis par les personnes qui continuent de se mobiliser sur la Place centrale de Ciudad de Guatemala pour demander vérité et justice.
Nous appelons les personnes solidaires qui veulent participer financièrement et aider les 4 jeunes filles qui ont survécu ce terrible incendie criminel à faire un don en cliquant ici. Les fonds recoltés seront remis à la Commission nationale contre la maltraitance et l’abus sexuel sur mineurs (CONACMI – Comisión nacional contra el maltrato y abuso sexual infantil) qui travaille déjà avec ces familles, notamment pour leur apporter un soutien psychosocial. #NOSDUELEN56